DN-MADe MENTION GRAPHISME

Design éditorial supports multiples

Lycée Argouges, Grenoble

Note de synthèse DN-MADe

Année 2023-2024

Éloge du désordre, mille chemins pour s’émanciper.

Comment réhabiliter le désordre en le revalorisant grâce au design graphique ?

Clémentine turc-giraud

Sommaire

Abstract

Préambule

Introduction

1. Définir l’ordre et le désordre, d’un point de vue social et philosophique

1.a. Quelles sont leurs synonymes, leurs connotations et ce qu’ils démontrent ?

1.b. La mise en avant du désordre : qu’est-ce qu’il nous apporte, comment il nous démarque ?

2. Le déclenchement du désordre.

2.a. Comment le désordre se manifeste et pourquoi il se déclenche ? (Pourquoi il peut être nécessaire ?).

2.b. Ce qu’il va engendrer, produire ?

2.c. Son exploitation graphique : densification et accumulation visuelles, sont elles nécessaires afin d’impacter et de s’affranchir des conventions ?

3. Le désordre exploité dans l’espace.

4. Connaitre ses limites afin de réussir à exploiter le désordre.

4.a. Les différents niveaux de l’ordre et du désordre.

4.b. Les limites de l’ordre et du désordre.

4.c. Jusqu’où peut on aller ? Les dérives qu’il peut y avoir.

4.d. Reconsidérer et réévaluer afin de savoir les nuancer.

Conclusion.

Remerciement

Références

Glossaire

Abstract

Most of the time, disorder is perceived as a bad thing / an inconvenience. In our society, the philosophical environnement is always compared to chaos. Why does our society want us to stick to order ? How can disorder be a solution to our emancipation ? [In graphic design, being messy can help to be spontaneous . Therefore we can wonder why our society prevents us from realising that order labels / restrains us.Why aren’t we taught how to deal positively whith disorder in our daily life ? Why does disorder have such a negative aspect ? It is necessary to answer those questions, if we want to be aware of the benefits of disorder and to understand the origins of the problems. ]

This study aims at showing how disorder can be a nice thing/ an interesting element for the development of our creativity, and how useful it may be in our society. But it will also show the excesses it generates.

This study therefore analyses the notions of order and disorder. Then it seeks to understand how they appeared socially, individually, and graphically. Finally it shows that saturation as well as graphic accumulation are linked to disorder. When looking for limits, it appeared that one cannot exist without the other.

To conclude the study shows that it is necessary to set limits when adding disorder in our lives and also in graphic design. It is important to consider that the revalorisation of disorder by graphic design does not impose a vision, but rather is an attempt at revealing a new one composed of many free elements.

Préambule

Le désordre étant perçu comme une caractéristique péjorative, que se soit au sens propre ou figuré, à travers cet article, je souhaite comprendre et contredire les a-priori que nous avons sur le désordre.

Pour moi, il n’est pas quelque chose de mauvais, mais plutôt une pratique qu’il faut savoir utiliser, qui contient de nombreux bienfaits. Ce thème m’a rapidement parlé. Dès que je me suis rendue compte qu’il englobait plusieurs enjeux, que se soit dans le design, dans la philosophie mais aussi dans notre société actuelle. Le premier qui ma touché fut dans le design, plus précisément dans le graphisme. Pourquoi certaines règles sont elles obligatoires ? Pourquoi ne peut on pas les transgresser, s’en affranchir pour questionner justement, le sens du graphisme et la liberté qu’on peut avoir avec celui-ci ?

Le fait que tout doit souvent être bien cadré, compréhensible au premier coup d’œil m’agaçais. Je voulais donc titiller ces règles, pour faire comprendre que selon moi, un design peut tout aussi bien fonctionner et être pertinent, en utilisant des principes qui contredisent cette rigidité demandée. Je voulais montrer qu’un beau désordre peut amener à la réflexion et au changement de plusieurs éléments stagnants.

Introduction

À l’échelle sociale et sociétale, le terme désordre reste constamment connoté négativement, vu comme le mal à éradiquer. On nous rabâche constamment que l’ordre doit régner, qu’il est le seul moyen d’acquérir la paix, mais est ce vraiment le cas ? À force que nos dirigeants, ainsi que notre éducation nous aient inculqué à bien nous tenir et suivre sans trop réfléchir des règles imposées, nous développons une peur de ce désordre, paraissant si dangereux. Socialement nous devons avoir une image propre, rigoureuse, un habitat, ainsi qu’une vie stable. Tout doit être au maximum organisé, hiérarchisé, afin d’avoir une bonne image. Notre société libérale et capitaliste incite à l’organisation afin de créer implicitement une société robotisée, conservatrice et productive, car le moindre « défaut » amènerait un dysfonctionnement à leur système.

Pourtant de nos jours, on réalise bien que notre société ne fonctionne pas si bien, ce système a donc des failles. Nous pouvons donc nous demander si ce n’est pas à cause de la suppression de variations et à l’instauration de règles bien trop strictes.

Ici, nous allons donc nous pencher sur cet élément qui effraie tant et essayer trouver pourquoi, en nous appuyant sur des visions philosophiques, scientifiques et sociales du désordre. Après l’avoir défini et compris dans sa globalité, l’interroger dans le domaine du graphisme et analyser comment celui ci est exploité servira à comprendre ce que le désordre et ses principes permettent d’engendrer. Nous allons réaliser qu’il comprend de nombreux bénéfices pour la création, l’évolution. Suite à cela, nous questionnerons ses limites ainsi que ses dérives néfastes, pour élaborer par la suite ce qu’il faut réaliser afin de s’en servir à bon escient.

  1. 1.Définir l’ordre et le désordre, d’un point de vue social et philosophique

Depuis la création du monde, l’ordre et le désordre sont en éternel conflit et infligent à l’homme de réelles questions. Que ce soit dans la philosophie, les sciences, la politique, dans l’art ou bien dans notre vie, ces concepts nous impactent.

L’ordre a souvent une meilleure réputation que son antonyme. Il est défini comme une finalité intelligente, doté d’une disposition ou succession régulière et hiérarchisée, qui systématiquement obéit à des lois. L’ordre est un bien composé, organisé de manière satisfaisante et rationnelle. Les éléments appartenant à un ordre ont une place bien définie. Dans un système politique, l’ordre est maintenu par une respect de conformité à un règlement, à une norme ; Quant au désordre, bien moins apprécié, il est défini par un manque d’ordre, un défaut de rangement, de disposition fonctionnelle ou esthétique, une absence de régularité, de sens ou de rigueur contraire aux attentes ordinaires. Souvent en opposition à un ordre établi, il rejette les conventions. Principalement en mouvance, il mène à l’agitation, la transgression ou à un manque de discipline. Souvent perçu aussi comme un ensemble d’accumulation, il peut être également dépourvu de hiérarchie.

Dans les sciences quantiques et philosophiques, le désordre se définit par l’absence d’un dessein intelligent. L‘ordre est pensé comme structure stable ou récurrente et, par là, reconnaissable et repérable. Le désordre alors n’est pas pensé comme ce qui est dépourvu d’une finalité, mais comme ce qui apparaît dépourvu de nécessité.

L’ordre contingent1 se crée non pas en confrontation au désordre, mais grâce et avec lui, il ne l’abolit pas mais il l’utilise. Une forme de complémentarité se crée.

On peut comparer cette contingence à la dualité entre Apollon et Dionysos qui parait dans l’écrit de Pierre Vial. Ces deux divinités, dans la croyance grecque, sont associées à l’art et son contraste entre l’art du sculpteur et le non structural.

« Ces deux instincts si différents marchent côte à côte, le plus souvent en état de conflit ouvert, s’excitant mutuellement à des créations nouvelles et plus vigoureuses, afin de perpétuer entre eux ce conflit des contraires que recouvre en apparence seulement le nom d’art qui leur est commun; jusqu’à ce qu’enfin, par un miracle métaphysique du ‘vouloir’ hellénique, ils apparaissent unis, et dans cette union finissent par engendrer l’œuvre d’art à la fois dionysiaque et apollinienne, la tragédie attique. »2

  1. 1.a.Quelles sont leurs synonymes, leurs connotations et ce qu’ils démontrent ?

« Les notions d’ordre et de désordre sont des notions apparemment simples et évidentes, qui pourraient être définies sans équivoque ni obscurité. Or, l’ordre et le désordre sont en fait des mots-valise comportant chacun beaucoup de compartiments au double ou triple fond. »3

Les premiers mots qui nous viennent en tête, ou quand nous cherchons sur internet qui se rapprochent de la signification de l’ordre sont : commandement, consigne, injonction, instruction, catégorie, alignement, conformité, discipline, norme etc. Ces synonymes font partie d’un champ lexical relativement stricte, ordonné, voire autoritaire. Pour le désordre, les synonymes qui ressortent ou qui raisonnent le plus sont : anarchie, confusion, dérèglement, désorganisation, détraquement, incohérence, agitation, mouvement, effervescence etc. Ils font parti d’un champ lexical opposé à l’ordre. Moins stricte, le ressenti ici peut paraître anxiogène face à un lexique sous-jacent à l’accumulation.

Socialement le désordre est mal vu. Il est rarement utilisé dans une phrase positive, assimilé à la marginalité ou même la saleté. Comment un simple mot peut-il engendrer autant de connotations péjoratives ? Un désordre va aussi plus souvent être décrédibilisé et moins pris au sérieux qu’une chose dite ordonnée. Cela montre déjà que leurs jugements de valeurs ne sont pas égaux : ce qui veut dire que notre avis sur un sujet sera d’office biaisé en fonction de la perception d’autrui sur l’ordre ou le désordre. Dans notre culture et donc notre langage, on voit bien qu’on nous a inculqué inconsciemment que le désordre était mauvais, qu’il fallait le balayer, le chasser, le réprimer.

Dans le podcast « comment le désordre est-il pensable »4, on nous parle de la thèse de « l’évolution créatrice » écrite par Henrie Bergson. Dans « la critique du désordre absolu », on nous explique que le désordre fait peur à la pensée humaine car il va au-delà de notre pensée mathématique et logique. Notre première pensée est donc de mettre de l’ordre dans le désordre. Notre pensée humaine impose ses propres critères sur ce qu’est un ordre ou son contraire. Pourtant, notre monde comporte un ordre bien plus complexe que l’on assimile donc au désordre. Si notre cerveau ne comprend pas une donnée, il l’assimilera au désordre car celui-ci souhaite le maîtriser. Bergson nous dit que dans le chaos il y a un ordre supérieur où tout ce qui nous échappe appartient à un ordre supérieur. Nous devons comprendre qu’un désordre qui n’est pas forcément maîtrisé exige un élargissement de notre pensée. Il faut dépasser notre logique binaire face à l’ordre et au désordre et chercher à les comprendre plus profondément.

Bernard Piettre cite dans son essai : « Nous craignons le désordre et désirons l’ordre. Nous pourchassons, dans la vie sociale, les fauteurs de désordre. Nous préférons une chambre en ordre plutôt qu’en désordre. Nous aimons, de façon générale, nous repérer dans un ordre social, historique, naturel, cosmique. Les notions d’ordre et de désordre relèvent du discours pratique, éthique, politique, voire mythique et religieux. Elles semblent être plus normatives que descriptives; et avoir plus de valeur que de réalité. »5

Dans la plupart des mythes des sociétés traditionnelles, la menace qui reste latente des forces du désordre justifie l’ordre institué et le châtiment à l’égard de ceux qui seraient tentés de le transgresser.

Mettre de l’ordre à n’importe quelle échelle permet une sensation de reprise de contrôle dans la vie. Les classes sociales les plus aisées auront tendance à montrer une image épurée et minimaliste de leur apparence et de leur capital. Optant pour la qualité, ils paraissent donc ordonnés, et tentent de mépriser la société qu’ils instrumentalisent hypocritement, car accumuler est mal perçu, ce serait se laisser envahir par la société de consommation. Or Yankel Fijakow6, codirecteur au centre de recherche sur le logement, cite que le problème de rangement est un vrai malaise, qui émerge depuis une dizaine d’années. En cause, le prix au mètre carré, qui impacte principalement les logements collectifs, fait disparaître les caves et réduit les surfaces mais encore ralentit la mobilité résidentielle. La notion d’espace saturé questionne donc un problème d’espace de rangement, non accessible à tout capital social. De plus, le choix de la place d’un élément se fait aussi en fonction des goûts esthétiques mais aussi par ceux qui sont valorisés socialement. À partir du moment où celui-ci vient transgresser les règles, il est considéré comme rebut.

Cela soulève donc plusieurs questions, en fonction des classes sociales : n’y a t’il pas différents sens des termes ordre et désordre ? Quelque chose de désordonné ne veut pas dire qu’il est sans valeur. De plus des éléments sans valeur peuvent tout à fait être très bien ordonnés. Chacun a sa perception de l’ordre et de la qualification de désordre en tant qu’élément saturé.

Certains bazars sont fonctionnels Yankel Fijalkow, prend comme exemple la circulation automobile à Lagos où l’on voit de gros embouteillages, mais dans lesquels tout le monde arrive à circuler. Une fluidité règne dans ce fouillis. Bergson écrivait que « le désordre est simplement l’ordre que nous ne cherchons pas ». On pourrait ajouter qu’il arrive que l’ordre soit en fait un supposé désordre où nous nous retrouvons sans avoir besoin de chercher. Si l’on qualifie donc de fouillis des organisations qui sont pourtant pertinentes pour certains, c’est aussi qu’il y a plusieurs strates d’ordre et de désordre. D’abord, « l’ordre physique et matériel des objets », liste le psychanalyste, puis celui qui existe dans la tête de chacun, qui suit « sa logique » personnelle et enfin « l’ordre moral », ce que la société enjoint à faire.

  1. 1.b.La mise en avant du désordre : qu’est-ce qu’il nous apporte, comment il nous démarque ?

Nous avons donc compris que si l’ordre était tant mis en avant, c’est parce qu’il nous garantit une certaine stabilité et nous décharge mentalement, étant donné qu’il nous fait suivre un schéma défini.

« Un beau désordre vaut mieux qu’une inerte ordonnance. » Site Eugène Savitzkaia7

Car en effet certaines personnes ne se sentent pas à l’aise avec cet ordre normatif, le transgresser devient un devoir et plus un choix, le fait de se réapproprier un espace, sa propre identité devient nécessaire. L’ordre dans sa globalité nous empêche de réfléchir par nous-mêmes. Ce qui créé une automatisation de la pensée qui arrange les personnes créant cet ordre. Pourtant l’ordre souhaite nous le cacher, mais il a des limites. Aucun humain ne peut supporter une telle robotisation : on peut le voir dans le système de la bureaucratie, où la rigueur établie capitaliste inhibe les travailleurs. À trop vouloir être ordonné pour faire du profit, on en perd notre humanité. Un trop grand nombre de systèmes d’ordre conduisent a une dis-régularité. Il est presque impossible de trouver des personnes aptes à un système si compliqué, rigide. Individuellement, les personnes moins ordonnées arrivent à mieux se retrouver dans ce qu’elles font. Ceci est lié au fait que la complexité d’un modèle d’ordre établi excède nos capacités cognitives, les personnes supposées les appliquer auront donc tendance à moins se retrouver. Un système trop rigide finira pas être contre productif.

Le désordre n’est pas constamment hasardeux ou énorme, cependant il permet de nombreuses variables de créations et de situations. Pas tout le monde ne se sent submergé dans un environnement décousu, celui-ci permet une plus grande accessibilité de choix. Certains éléments qui n’ont soi-disant rien à faire ensemble peuvent se rencontrer, afin de créer de nouvelles fonctions. L’un peut aller sans l’autre mais ensemble ils permettent une innovation. Le désordre permet une meilleure inclusivité, la hiérarchie des éléments n’est quasiment pas présente, une notion de collectif apparait.

Le site désordre.net8 exploite une forme de hasard dû à des algorithmes, qui nécessite un ordre afin de créer un suspens dans ce qui va nous être dévoilé. Nous sommes face à une densité d’éléments en mouvement. À mesure que nous cliquons, des pages s’ouvrent, remplies de contenus, où la encore celles-ci contiennent des éléments qui emmènent sur une autre page etc. Le contenu semble infini, tel un labyrinthe où on s’y perd, on cherche une finalité, en soit qui est impossible étant donné l’accumulation de contenu et l’algorithme du site. Il est alimenté quotidiennement, ce qui augmente son contenu. L’auteur travaille et questionne les frontières, leurs limites par l’utilisation permanente d’un flux où se mêlent images, sons,ainsi que des textes accompagnés d’éléments de la vie familiale, de trajets du quotidien... Tout cela a commencé à faire du « blog désordre » un laboratoire principal de l’Internet, hors genre, ou tous genres convoqués. Le site regorge de petit détails cachés, la barre d’info par exemple, dès qu’on la réactualise, nous dévoile une citation en lien avec le désordre à chaque fois différente. Ce bazar phénoménal nous montre qu’il est réfléchi, qu’il y a en effet une part de hasard pour l’usagé qui ne sait pas sur quoi il va tomber, mais pourtant, le travail fourni pour sa création, et pour que la vision de désordre fonctionne, nécessite énormément d’organisation. Un paradoxe apparait donc, le site regorge d’un amas d’éléments spontanés, désordonnés, tout l’inverse de quelque chose de prévisible ( ex : il nous affirme dans ces textes, que les photos qu’il réalise sont authentiques et il ne s’impose pas de les prendre. Il est donc libre dans sa création ). Il nous dévoile aussi un magnifique fouillis spontané qu’il a créé et accumulé pendant plusieurs années qui est malicieusement rangé. Or seul son créateur connait cette organisation. Puis à partir de ce désordre organisé, il vient recréer un désordre visuel et utilitaire.

En politique, on peut penser que le terme désordre est donc utilisé afin de séparer et défrayer la norme sociale face aux gens dits marginaux. Il est plus facile de diriger un peuple sage, qui ne questionne pas son environnement. Cette lutte contre le désordre passe par une diabolisation du terme afin d’inverser les rôles. Dans le podcast intitulé les « réthorique du désordre9 », le sujet est abordé. En effet, l’opposition ordre/désordre est commune en politique. Le gouvernement présent se positionne comme le porteur de l’ordre accusant l’opposition perçue comme des attaquants de faire du désordre. Le président attaquant cite « l’ordre raisonnable aux violences qui risquerait de nous faire revenir à l’état de nature », qui est l’idée du philosophe Hobbes dans lequel le monde s’entre-déchire, où l’on aurait besoin d’un ordre étatique pour contenir cette nature soit disant incontrôlable sans celui-ci. Face à cette rhétorique, les opposants revendiquent le désordre en essayant de retourner les connotations négatives devenant positives, comme avec le slogan « tout cramer devient vital » qui associe la destruction et le désordre non pas à la mort mais à la vie. Ou alors il vont accuser le dirigeant opposé comme faiseur de désordre, alors qu’il y aurait tant de problèmes à régler afin attiser un climat de violence telle l’image du pompier pyromane, qui représente bien ce point.

Or les accusations de chaque coté sont purement subjectives, car on sait bien qu’en fonction des parties politiques, la morale et leurs revendications sont différentes. Se servir de cette rhétorique est une stratégie ponctuelle qui s’articule dans chaque débat.

  1. 2.Le déclenchement du désordre.

Edgar Morin,sociologue, aborde dans une conférence la manière dont des phénomènes se déclenche, grâce à ce qu’il nomme la notion de stratégie .Elle se définit par l’opposition à un programme qui constitue une conséquence d’actions prédéterminées, qui ne peut s’accomplir que dans un environnement comportant très peu d’aléas ou désordre.

« La stratégie se base sur des conditions à la fois déterminées, aléatoires, incertaines dans laquelle va s’engager l’action en vue d’une finalité donnée. Le programme ne peut se modifier, il ne peut que s’arrêter en cas d’imprévu ou danger. La stratégie, elle, peut modifier le scénario d’actions prévues, en fonction des informations arrivant en cours de route, inventer de nouveaux scénarios. Elle peut même utiliser l’aléa à son profit, nous usons de stratégies plus ou moins raffinées; c’est-à-dire que nous pensons nos actions en fonction de nos certitudes ( ordres ), de nos incertitudes ( désordres, aléas ) et de nos aptitudes à organiser notre pensée ( stratégies cognitives, scénarios d’action ). »10

L’action est possible que s’il y a à la fois de l’ordre, du désordre et de l’organisation. Trop d’ordre asphyxie la possibilité d’actions. Trop de désordre fait chavirer l’action dans les tempêtes et celle-ci devient un pari au hasard.

Plusieurs niveaux de désordre sont possibles, Il faut savoir que le désordre est constitué de plusieurs paliers et se manifeste plus ou moins intensément. Une conséquence perçue minime pour certaines personnes, peut paraître immense pour d’autres. Quand un ordre est établi, les personnes arrivent plus ou moins à l’assimiler. L’ordre, le désordre et l’organisation se développent ensemble, à la fois contractuellement et coopérativement, de toute façon, inséparablement.

  1. 2.a.Comment le désordre se manifeste et pourquoi il se déclenche ? (Pourquoi il peut être nécessaire ?).

Le désordre matériel est le résultat d’une dérégulation dû à un désordre premièrement interne ou implicite. Il se manifeste systématiquement à partir de quelque chose déjà existant, car son but est d’utiliser ou de supprimer, superposer des choses qui existent déjà, pour créer quelque chose de nouveau idéalement plus performant.

« Quand l’ordre est injustice, le désordre est déjà un commencement de justice. »11

Un désordre va donc se déclencher pour repenser une organisation établi. Il est dans l’action. Nous pouvons prendre en exemple des mouvements militants, suite à un système engendrant des inégalités, un ensemble collectif va se créer afin d’identifier le problème, le comprendre, chercher à le déjouer, trouver comment procéder. Après avoir trouvé une supposée solution, celle-ci va se concrétiser par des actions, qui forcément vont créer des dissonances dans le système actuel. N’étant pas dans un monde où l’ordre est ultime, il y aura donc forcement de petits ou grands aléas. Individuellement la tolérance au désordre est plus ou moins bien vécue. Or, étant donné que notre cadre occidental souhaite mener un règne d’ordre absolu dans tout ce qui nous appartient, être une personne dite désordonnée revient donc à gêner cette recherche absolue. La personne qui aura une perception de l’ordre ainsi qu’une conception du rangement différente, sera déjà un déclenchement à un élément d’un désordre.

Il peut donc être nécessaire pour faire évoluer une situation par exemple. Il peut donner des résultats surprenants et positifs. Certes, il peut être spontané, mais cela ne veut pas dire qu’il n’est pas réfléchi. N’oublions pas non plus qu’il peut venir crescendo. Il ne faut pas non plus le voir comme une finalité une fois présent. L’ordre établi règne justement à cause de cette peur du désordre inconnu. Or, cet inconnu peut autant être positif que négatif. Sa nécessité semble donc inévitable afin de garder un certain équilibre.

  1. 2.b.Ce qu’il va engendrer, produire ?

Les conséquences d’aléas ne sont pas forcément extrêmes, il peuvent servir afin de réguler une situation ou quelque chose de trop stagnant. Nous pouvons prendre comme exemple le travail de Roxanne Maillet qu’elle met en œuvre dans une exposition « freed from designer. »

« Freed from Designer se veut comme une invite à s’affranchir des normes et des diktats (parfois rigides) du design graphique et à créer des formes et glyphes fluides, sans hiérarchie entre les genres et les styles. »12

Dans cette scénographie les visiteurs évoluent dans un semblant d’appartement et peuvent manipuler les œuvres exhibées. Ces ensembles d’objets graphiques, de documents et de différents éléments proposés (tee-shirts, affiches, magazines, packagings…) tendent à recréer un environnement vernaculaire et domestique dans lequel ils jouent avec les archétypes d’un certain genre de design, ordinaire et quotidien, habitué à se déployer sur des supports multiples et réalisé par des auteurs souvent anonymes, à l’instar de l’anonymat longtemps dévolu aux créatrices. Les éléments de la vie quotidienne exposés, semblent normaux, sauf que, à y regarder de plus près, nombre de noms de marque, sont allègrement détournés par des termes utilisés dans l’argot lesbien et féministe. (Sensodyke13 au lieu de sensodyne etc). Son travail perturbe le champ de vision, elle déjoue la continuité du regard. Les changements futiles, peuvent être inaperçus par certains spectateurs. La typographie des logos reste la même, seules quelques couleurs et lettres changent. Ici elle sème donc une pagaille dans nôtre esprit. Notre cerveau, en lisant, va peut-être par automatisme rectifier la faute, étant donné qu’il a tendance à ranger et remettre toutes les anomalies incohérentes à leur place. Ici, on crée un désordre pour mettre en avant ce qui, dans notre société, est une minorité qu’on marginalise et met de côté. Les communautés queer et lesbienne peuvent être perçues dans notre société comme non conformes aux normes, donc mal vues, créant une dissonance dans une société héteronormée.

Ceux qui dénoncent une forme de désordre sont ceux qui stigmatisent et qui définissent une norme finie. Alors que les personnes stigmatisées, elles, ne rentrent juste pas dans les normes binaires et s’en affranchissent pour une liberté d’expression et d’être. Perturber les normes imposées est donc nécessaire pour faire changer les soit disant dogmes de la société.

Des remises en question pertinentes et novatrices peuvent engendrer des changements de perception, une ouverture d’esprit amenant à un militantisme grâce au graphisme.

  1. 2.c.Son exploitation graphique : densification et accumulation visuelles, sont elles nécessaires afin d’impacter et de s’affranchir des conventions ?

Dans notre société actuelle, créer un désordre va être mis en place pour remettre en question les conventions imposées. « Est-ce que le design graphique doit répondre à une seule interprétation et compréhension »14 Anja KESSER graphiste. En opposition au besoin constant de tout comprendre et consommer rapidement, le désordre intervient pour ralentir celui-ci. L’espace exploité serait donc chargé d’éléments relativement non hiérarchisés afin de troubler légèrement le spectateur, qui peut donc interpréter l’élément par son propre spectre. La lecture ne lui sera pas facilitée. Ce qui permet d’apporter plus d’attention à cet espace. Quelque chose de fort visuellement sera plus impactant dans notre mémoire que quelque chose d’épuré (le désordre menant à des multiples choix, il permet une meilleure distinction). Graphiquement, nous allons donc passer par des visuels qui peuvent revendiquer une confrontation à la norme, grâce au rejet des règles typographiques par exemple, ou alors aborder l’image, le visuel différemment. L’image peut être un désordre, mais le désordre ne provient pas forcement de l’image. Tout dépend de la limite du cadre que l’on va s’imposer. Dans une variable, certaines limites seront franchies, alors que dans une autre, les limites ne seront pas les mêmes. Ces variations graphiques proviennent suite à des choix et des intentions, afin de viser un but plus ou moins précis.

Nous pouvons prendre en exemple le travail d’Anja Kaisser qui questionne la société binaire et hétéronormée, ainsi que celles du graphisme. Sa posture de graphiste sort des règles imposées, offrant une nouvelle manière d’aborder celui ci. Ses visuels, qui semblent incompréhensibles, cachent en vérité une richesse incroyable et des soulèvements de questions primordiales et pertinentes. La composition est désordonnée, mais intelligente.

« Sexed Realities – To whom do I owe my body ? » est constitué d’un site internet, comportant des gifs, une vidéo sonore et sa ligne de serviettes. Il est intéressant de se rendre compte que l’essence même de cette réalisation bouleverse les normes. Il n’est pas commun qu’une graphiste ait ce genre de support tel que des serviettes, qui représentent ici les forces sociales qui pèsent et imposent un formatage du corps humain . Dans sa réflexion théorique, elle montre que le corps sert aujourd’hui de surface de référence pour les réalités d’ordre sexospécifique. Dans ses designs, elle se réapproprie ce qu’on nous impose, et l’interprète graphiquement en mélangeant, superposant des éléments avec des formes autant géométriques que organiques. Les supports utilisées sont saturés d’informations, de gros textes, de lignes... Ce qui nous confronte à nous plonger dans ces réalisations pour se les rapproprier et observer les détails, les éléments, afin de comprendre et de pouvoir se questionner sur les normes du corps dans la société et comment celle-ci nous l’impose.

La densité d’informations visuelles présentes fonctionne et marque l’esprit. C’est avec des designs impactant et différents que l’émancipation évolue. Ici, c’est un désordre réfléchi qui est créé, il libère la parole et la créativité mais encore une fois, il image une pression invisible que l’on nous impose dans cette société normée.

Nous retrouvons quelque notions similaires dans l’affiche de Seifeldeen Elfouly15, le message était de dénoncer notre consumérisme insensé non systématique vers les ressources naturelles, en mélangeant des visuels exprimant les vies artificielles que nous désirons construire afin d’éviter la réalité sadique que nous vivons. Mais aussi pour nous interroger à repenser notre rôle en tant que créatures dominantes de cette planète.

L’affiche mélange image et typographie, des contrastes colorimétriques sont utilisés ainsi que le sens des images n’ayant à première vu pas forcement de lien. L’affiche ressemble à un collage d’images saturées et denses mais, on retrouve tout de même une composition comportant une grille. La mise en page de l’affiche retranscrit ce qui est écrit dessus ( repenser, recycler, redesigner ), ici avec des images d’objets qui ont une finalité ( consommables ), on les réutilise pour créer un tout, une superposition d’objets qui n’ont pas de sens telle la société consumériste.

Ici on se moque de cette société capitaliste et dangereuse pour l’humanité, en se réappropriant ces objet pour créer quelque chose d’unique qui incite à la réflexion. Le capitalisme nous enferme dans un besoin de consommer, d’avoir toujours plus et de faire du profit,.Or la pratique d’un design anti-utilitariste est complètement l’opposé de la surconsommation. Dépourvu de règles, il permet une grande liberté d’expression graphique. Les éléments n’ont pas besoin d’être hiérarchisés et cadrés à l’extrême. La lisibilité n’est pas faite pour être facile, car ici on incite l’observateur à prendre son temps.

En ayant une pratique qui créer un dysfonctionnement graphique, on remet en cause tout se qui peut être considéré comme conventionnel.

  1. 3.Le désordre exploité dans l’espace.

Spatialement, le désordre aura davantage d’impact sur nos sens visuels et sensoriels. En effet, une image figée d’un espace sera moins transcendante que l’espace en lui même, chargé de vie et de saturation. Plusieurs techniques de détournement de l’espace ont étaient utilisées par des artistes, afin de créer de nouveau univers souvent dépourvus des conventions attendues. Ces espaces nous immergent, perturbent par l’absence de repères.

Créer des œuvres monumentales spontanément fait partie du travail de Kurt Schwitters, artiste allemand connu pour utiliser des coupures de magazines, des matières résiduelles et d’autres objets recyclés. « Je ne vois pas pourquoi des tickets de tramway usagés, des morceaux de bois flottants, des boutons et de vieux rebuts de grenier ne pourraient pas servir de matériaux pour la peinture. » Il cherche en effet à s’approprier les rebuts de la société industrielle et urbaine, faisant entrer la réalité quotidienne dans l’art.

Dans les années 20, dans sa maison, Schwitters entreprend de construire une vaste structure dans laquelle s’encastrent, dans des cavités, ses œuvres et celles de ses amis. La construction envahit peu à peu toutes les pièces et même tous les étages de la maison, et l’artiste lui donne le nom de Merzbau (construction Merz). Le Merzbau est une œuvre évolutive. Au fil du temps, le travail de Schwitters se répand jusqu’au deuxième étage et dans la cave, s’immisce même dans l’appartement de ses parents. Pour lui un Merzbau n’est jamais réellement terminé. L’absence de plans détaillés, présentant des mesures, des élévations ou différentes vues de l’appartement trahissent le caractère instinctif et organique de l’artiste. On peut donc déduire qu’il ne réalisait pas ces plans afin d’organiser ou de schématiser son travail, mais plutôt dans le but d’expliquer le projet et son évolution à quelqu’un qui n’en fait pas l’expérience. Les structures semblent s’élever d’elles-mêmes, sans être prévues ou étudiées d’avance. On comprend donc que Schwitters a toujours travaillé le Merzbau d’une façon instinctive et naturelle, prônant la réutilisation d’anciens matériaux, la fluidité ainsi que l’importance de l’instinct et du ressenti.

Inspiré du merzbau, l’exposition merzbau garden est créée en 2021, projet collaboratif qui évolue en trois temps, combine des réalisations de divers artistes et designers berlinois. L’espace est entièrement dédié aux créations qui sont disposées afin de créer un lieu unique. Aucune information dans la pièce ne détaille les crédits, le lieu nous incite à l’explorer, comportant un aspect ludique où notre vision est attirée par les nombreuses formes et couleurs, ainsi que ses objets détournés. Contrairement à Schwitters, l’architecture est moins déstructurée, l’exploitation du désordre se présente dans des éléments saturés ainsi que des formes plus douces, nos sens en sont donc moins troublés.

Nous pouvons aussi évoquer le travail de Thomas Hirschhorn qui se concentre sur la créations de sculptures aux matériaux précaires, issus de la vie courante, tels que des vieux papiers, des feuilles d’aluminium, des cartons etc. Ses œuvres est installations sont monumentales et reflètent les questionnements, les contradictions et les scandales qui traversent la société contemporaine, marquée par la mondialisation. L’artiste milite en faveur davantage de justice et d’égalité. Créateur d’installations apparemment désordonnées, improvisées et pauvres, mais fortement structurées en réalité. Son atelier, aussi saturé que ses œuvres, et bondé de papier déchiré et autres matériaux, qui implicitement représentent une idée, un fragment de sa pensée. La particularité de cette sorte de laboratoire est que, bien que certains morceaux éparpillés ne soient pas encore partie intégrante d’une œuvre, son ensemble en devient une.

Ainsi, nous remarquons certains principes similaires entres ces artistes, tels que la réutilisation, la saturation d’éléments plastiques ou colorimétriques, une forme de spontanéité. Mais pourtant, on ressent dans ces espaces singuliers une forme d’homogénéité.

L’artiste Nathalie Lopizzo, interviewé pour cette NDS, ayant créée aussi un univers unique dans sont appartement nous explique brièvement sa manière de travailler ainsi que son ressenti. ( Voir annexe : interview ).

  1. 4.Connaitre ses limites afin de réussir à exploiter le désordre.

En démystifiant le désordre, on réalise qu’on ne peut aucunement vivre sans.

Notre univers en contient, il est impossible qu’un ordre ultime existe donc. En sachant cela, il faut apprendre à tolérer ses variations afin de pouvoir exploiter ce désordre pour le réorganiser à sa manière, que ce soit conformément ou non. Penser, ce n’est pas servir les idées d’ordre ou de désordre, c’est s’en servir de façon organisatrice et parfois désorganisatrice pour concevoir notre réalité.

  1. 4.a.Les différents niveaux de l’ordre et du désordre.

Ces deux notions se manifestent plus ou moins intensément, que ce soit visuellement, spatialement, etc. Dans certains strates, l’accumulation, l’irrégularité peuvent être plus ou moins présentes. Certains facteurs auront un impact insignifiant pour une situation spécifique, alors que pour une autre cela sera le coup de grâce. Une limite est toujours instaurée, quelle soit proche ou éloignée. On ne peut percevoir un ordre ultime ou son opposé étant donné qu’il ne serait même pas perceptible. C’est donc dans les détails que nous trouvons ces limites. Prenons l’exemple d’une affiche, celle ci peut comporter un hiérarchisation dû à des règles typographiques imposées, qui ne seront pas perceptibles car ancrées en nous ( sens de lecture,grilles... ) Mais sa mise en page peut être un saturé de couleurs, d’images ou peu importe. Les personnes qui verront cette affiche n’auront donc pas forcement la même perception de degrés d’ordre et de désordre, qui visuellement sont subjectives, mais techniquement objectives. Dans cet exemple, on peut aussi prendre en compte le format qui instaure obligatoirement une limite à la création d’un désordre. A partir de ses limites, on réalise donc qu’il y a différent niveaux de limites qui nous sont imposés, sans que l’on ne s’en rende forcement compte, tout est une question d’acceptation de ceci et de compréhension de la nécessité de certaines barrières. En revanche, on aura souvent tendance à retrouver une forme d’ordre ( des liens entre différents éléments, une harmonie ), dans quelque chose foisonnant d’irrégularités. Ce qui peut être étonnant. Pourtant, plus un élément comportera des facteurs, plus il y aura de chance que certains aient des similitudes.

  1. 4.b.Les limites de l’ordre et du désordre.

Il faut savoir que dès qu’il y a un ordre il y aura forcément un désordre et inversement, ceux là ne sont que temporaires, que se soit à cour ou long terme. L’ordre de la nature et les lois de l’univers se manifestent en même temps que se forment les premiers corps matériels, les particules, L’ordre, le désordre et l’organisation se développent ensemble, à la fois conflictuellement et coopérativement, de toute façon, inséparablement. Tous les systèmes sont globalement des agitations organisées de façons complexe. Tout ce qui est transformation, évolution, développement, complexification est donc toujours lié à des accidents, des dégradations, des destructions, des désintégrations... C’est pourquoi notre univers ne peut plus être soumis à un principe suprême d’ordre.

Dans le podcast comment contenons nous le chaos16, on nous dit que le chaos est l’idée d’un désordre absolu sans aucune règle. Notre existence dépendant d’un ordre nécessaire maintient ce chaos, le contient afin de le réguler comme si il était un danger. Par peur de ce désordre, on finit par créer des ordres excessifs afin de résister comme si le désordre était une menace alors qu’il faudrait plutôt le tolérer. Nous pouvons réussir à tirer des éléments positifs du chaos en s’en servant pour créer et innover.

  1. 4.c.Jusqu’où peut on aller ? Les dérives qu’il peut y avoir.

Poussés à l’extrême, ils deviennent donc néfastes pour la vie, il faut donc savoir rester vigilant à ce qui nous entoure. Sur une échelle politico-sociale, l’anarchie est utilisée dans le langage commun pour définir un désordre total dans une société. Or le réel principe d’anarchie n’a rien à voir avec la manière dont les politiques l’utilisent. Son concept est basé sur un système politique qui vise à l’émancipation de toute autorité ou tutelle gouvernementale. L’Etat est considéré comme n’étant pas nécessaire et aucun individu ne se trouve sous la domination d’un autre (absence de hiérarchie entre les hommes). Elle est fondée sur l’égalité entre les individus, la libre association, l’autogestion, voire parfois le collectivisme. L’anarchie est donc structurée et organisée, sans qu’il y ait une quelconque primauté de l’organisation sur l’individu. « L’anarchie, c’est l’ordre sans le pouvoir. » Proudhon, philosophe nous le cite bien des le XIXe siècle.

L’anomie, concept bien moins connu, est l’amalgame que nous faisons du concept d’anarchie. C’est Émile Durkheim, sociologue qui définit ce concept au début du xxe siècle pour caractériser la conduite délinquante ou criminelle. Durkheim nomme ceci le suicide « anomique », provenant d’un déréglement de l’activité des hommes, qui a tendance à se multiplier en période de crise politique. Une anomie pourrait être suscitée par une propagande promouvant l’isolement ou même la prédation plutôt que la coopération. Ce serait la manifestation d’une politique antisociale.

« Si l’anomie est un mal, c’est avant tout parce que la société en souffre, ne pouvant se passer, pour vivre, de cohésion et de régularité. Une réglementation morale ou juridique exprime donc essentiellement des besoins sociaux que la société seule peut connaître »17

L’idée selon laquelle l’anarchie mène nécessairement à l’anomie est répandue et est au cœur des oppositions à l’anarchie. Les anarchistes s’en défendent. Pour eux, les sociétés actuelles, hiérarchisées, créent le chaos plutôt que l’ordre. À l’opposé, les anarchistes conçoivent : l’établissement d’un ordre collectif, juste et égalitaire, l’union de l’anarchie et de l’ordre (l’ordre moins le pouvoir)

On peut citer la célèbre maxime de Proudhon : « La plus haute perfection de la société se trouve dans l’union de l’ordre et de l’anarchie. »18

Mais aussi ces phrases de Hem Day : « On ne le dira jamais assez, l’anarchisme, c’est l’ordre sans le gouvernement; c’est la paix sans la violence. C’est le contraire précisément de tout ce qu’on lui reproche, soit par ignorance, soit par mauvaise foi. »19

  1. 4.d.Reconsidérer et réévaluer afin de savoir les nuancer.

Dans notre société occidentale, il faut donc reconsidérer ces notions afin de les mettre en œuvre à bon escient, n’étant pas constantes, il faut savoir les analyser pour que l’un ne stagne pas plus que l’autre. L’un rigidifie et amène un désordre interne, tandis que l’autre mènerait possiblement à une hécatombe visible. Un questionnement individuel est nécessaire afin de pouvoir par la suite collectivement réfléchir et débattre des problématiques liées à l’ordre et au désordre. Or, redéfinir ces notions reviendrait à détruire notre système établi depuis des siècles, il est donc difficile de concevoir un changement sociétal aussi radical, qui utopiquement se déroulerait dans une harmonie totale. Des discordes apparaîtraient forcement étant donné que notre monde perçoit le désordre comme néfaste à la paix. Souhaiter un monde où l’ordre et le désordre coopèrent est malheureusement inimaginable dans notre société séparatiste.

Ayant chacun deux faces qui s’opposent, le désordre représente la délinquance, les dérèglements, mais aussi la liberté, pourtant celle-ci ne s’identifie pas au désordre. La liberté nécessite un minimum d’organisation et de règles, mais elle nécessite aussi de la tolérance en face. Quand à l’ordre il représente les régulations qui permettent cette liberté mais aussi des barrières qui empêchent d’être libre. Il est compliqué de réduire la liberté à ces notions, qui restent insuffisantes et complexes pour concevoir la liberté. Il faut donc rompre avec l’idée que la liberté ne nécessite que de l’ordre où toute nouveauté est perçue comme déviante et dangereuse. Il est impossible de supprimer les débats et conflits nécessaires pour évoluer. Nous voyons donc que la liberté nécessite de l’ordre et du désordre, mais aussi une organisation de ceux-ci afin de développer différent paliers d’évaluation. Toute ces informations sont relatives aux problématiques liées au graphisme.

Conclusion.

Notre étude s’est intéressée à l’influence de l’ordre et du désordre dans notre société et dans nos vies actuelles. Nous avons pu réaliser que spatialement, à l’échelle humaine, des limites seront toujours présentes à cause de l’espace utilisable. Socialement et philosophiquement ces concepts étant plus abstraits, nous avons conclu que le résultat d’un ordre rigide, inciterait à une anomie plausible. Mais qu’un désordre sans un minimum d’organisation serait synonyme aussi d’un mal être latent. Si l’on organise un protocole de travail qui bouleverserait des cases imposées, le rendre tangible à l’aide d’une saturation et désorganisation visuel permettrait de renverser les ordres établis visés.

Après avoir prouvé que les aléas peuvent être bénéfiques, faut-il encore trouver une manière de les mettre en œuvre, afin de révéler leurs bienfaits à l’aide du design graphique. Dans tout désordre règne une harmonie afin de le rendre fonctionnel.

Étant dans une posture de designeuse autrice, en invitant à la réflexion et au questionnement d’enjeux sociaux et graphiques, je souhaite agir à l’aide de visuel privilégiant un style expérimental plutôt qu’utilitaire.

Pour revaloriser ces notions et ces principes, il est important de faire de la médiation sur ce thème. Le but serait de montrer différentes manières de s’affranchir de dogmes et de prouver leurs bénéfices à l’aide du design graphique, suite à la mise en œuvre de productions graphiques et artistiques, présentant des principes évolutifs, pluriels à travers différents médium et format.

Par ces productions, il serait envisageable de créer une ou plusieurs éditions qui permettraient de comprendre et retranscrire la diversité créative, les processus ainsi que les réponses qui en découlent. Le souhait est de dé-diaboliser ce terme à l’aide du graphisme, pour montrer qu’il est nécessaire politiquement, artistiquement mais aussi personnellement afin d’ouvrir les esprits et réaliser les problèmes liés à certaines règles imposées et automatisantes.

Remerciement

Je remercie sincèrement l’artiste Nathalie Lopizzo que j’ai pu interviewer pour cette note de synthèse. Je remercie également mes professeurs et camarades qui m’ont accompagné et guidé. Ainsi que ma famille pour la relecture.

Références

Ordre et désordre le point de vue philosophique. Bernard PIETTRE, professeur de Philosophie https://www.u-picardie.fr/curapp-revues/root/40/bernard_piettre.pdf_4a0931d81d9c1/bernard_piettre.pdf

EDGAR MORIN, sociologue et philosophe des sciences. Conférence retranscrite ordre et désordre. http://palimpsestes.fr/textes_philo/rig/morin.pdf

COMMENT LE DÉSORDRE ET IL PENSABLE. 03/05/23 Le Pourquoi du comment : philo Par Frédéric Worms. podcast : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-pourquoi-du-comment-philo/comment-le-desordre-est-il-pensable-3254498

La chronique langue de Laélia Véron. 2023. La rhétorique de l’« ordre » et du « désordre ». https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-chronique-langue-de-laelia-veron/la-chronique-langue-de-laelia-veron-du-mercredi-05-avril-2023-9674455

Eric Abrahamson & David H. Freedman, « Un peu de désordre = beaucoup de profit(s) « (Éditions Flammarion). https://www.transmutatis.fr/enseignement-managérial-focus/ordre-ou-désordre-ou-l-art-d-agir-avec-efficacité/

2023 Le Pourquoi du comment : philo Par Frédéric Worms. podcast : Comment contenons-nous le chaos ? https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-pourquoi-du-comment-philo/comment-contenons-nous-le-chaos-4905890

https://fontsinuse.com/uses/25191/re-rethink-redesign-recycle RE : Rethink, Redesign, Recycle Seifeldeen Elfouly 2019

Arrêtons de voir le désordre comme un mal à éradiquerb Daphnée Leportois — 1 février 2019 à 7h18 https://www.slate.fr/story/172695/obsession-rangement-minimalisme-desordre-mepris-classe-marie-kondo

Designer Anja Kaiser Blends Corporate Culture + Tumblr Vibes into Explorations of the Female Body, AGA EYES ON DESIGN, article publié en 2017

https://eyeondesign.aiga.org/designer-anja-kaiser-blends-corporate-culture-tumblr-vibes-into-explorations-of-the-female-body/

FREED FROM DESIGNER , Félicité Landrivon & Roxanne Maille, exposition 2022

https://www.ensba-lyon.fr/actualite_roxanne-maillet-et-felicite-landrivon-freed-from-designer

https://www.fondationdesartistes.fr/evenement/maba/freed-from-designer/

Glossaire

désordre cntrl

A.− Domaine de la vie phys. ou psychique des pers.Manque d’ordre ; défaut de rangement, de disposition fonctionnelle ou esthétique.

1. [Le désordre affecte la disposition régulière et normalement attendue des choses]

a) [État qui affecte un inanimé concr., notamment un lieu] Absence de régularité dans le rangement, dans l’ordonnance, qui fait qu’on ne s’y retrouve pas. Par toute la pièce un désordre fantastique, un remueménage impossible (Pergaud, De Goupil,1910, p. 232).

− En bonne part. [Accompagné d’une épithète à valeur laud.] Des jardins, dont l’irrégularité pittoresque et le savant désordre font un des premiers charmes (Delille, Homme des champs,1800, p. IX) :

3. Quel désordre aimable : non un désordre d’abandon, mais le désordre intelligent qui marque une présence. Il garde encore l’empreinte du mouvement. Une chaise à peine reculée d’où l’on s’était levé la main appuyée à la table : il [Bernis] vit le geste. Un livre ouvert : qui vient de le quitter ? Pourquoi ? La dernière phrase chantait peut-être encore dans une conscience. Saint-Exupéry, Courrier Sud,1928, p. 64.

b) [État qui affecte l’aspect extérieur d’une pers.] Manque de soin ou de rigueur contraire à la présentation attendue, ordinaire. Désordre des cheveux, de la toilette, des vêtements. Synon. abandon, laisser-aller, nonchalance, négligence.Sur la fraîche ottomane en désordre étendu (Sainte-Beuve, Poésies,1829, p. 72).

d) Domaine de l’activité de l’esprit.Manque de cohérence et de logique. Désordre et confusion. Détails incohérents qui semblaient surgir au hasard dans une mémoire en désordre (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Allouma, 1889, p. 1314) :

7. ... pouvoir parler presque sur-le-champ, sans fatiguer ses auditeurs du désordre de ses idées, de la diffusion de son style, sans les révolter par d’extravagantes déclamations, par des non-sens grossiers, par de bizarres disparates. Condorcet,Esquisse d’un tableau hist. des progrès de l’esprit hum.,1794,p. 86.

8. ... l’idée de désordre dans la vie courante. Quand j’entre dans une chambre et que je la juge « en désordre », qu’est-ce que j’entends par là ? La position de chaque objet s’explique par les mouvements automatiques de la personne qui couche dans la chambre, ou par les causes efficientes quelles qu’elles soient, qui ont mis chaque meuble, chaque vêtement, etc., à la place où ils sont : L’ordre, au second sens du mot, est parfait. Mais c’est l’ordre du premier genre que j’attends, l’ordre que met consciemment dans sa vie une personne rangée, l’ordre voulu enfin et non pas l’automatique. J’appelle alors désordre l’absence de cet ordre. Bergson,L’Évolution créatrice,1907,p. 233.

B.− Domaine de la vie mor., soc. ou spirituelle des pers. ou des groupes.Manquement souvent voulu ou opposition à l’ordre établi.

1. THÉOL. Rupture de l’ordre primitif établi par Dieu pour l’univers. Ce désordre, cette laideur et ce mal que l’homme a introduits dans la création

ordre ctrnl

I. − Disposition, relation intelligible entre les choses.

A. − Rapport intelligible, satisfaisant aux exigences de l’esprit, pouvant être saisi ou institué entre différents éléments.

B. − Disposition, succession régulière, constatée ou instituée.

a) Rapport de succession, classification obéissant à une règle ou à une convention.

Ordre hiérarchique. Classification selon laquelle chaque terme est subordonné au suivant en fonction d’une norme établie. Après avoir passé par le bien absolu, on retrouve les biens illusoires et partiels, mais dans un ordre hiérarchique qui fait qu’on ne se permet la recherche de tel bien que dans la limite permise par le souci de tel autre (S. Weil, Pesanteur,1943, p. 60).

− MATH. Rapport de succession obéissant à une loi. Ordre de valeurs croissantes, décroissantes ; ordre des nombres entiers ; ordre sériel*.

α) Dans le domaine des Beaux-Arts.L’ordre et les proportions. Dans son acception plus restreinte, la composition n’est autre chose que l’ordonnance, c’est-à-dire l’art de mettre en ordre les éléments du tableau (Ch. Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p. 496).

C. − Organisation satisfaisante et rationnelle.

1. Disposition, manière de ranger, d’arranger les choses, de déterminer leur place de la façon qui semble la plus satisfaisante, la plus fonctionnelle. Être rangé, disposé convenablement ; être en état de fonctionner

D. − Ensemble de règles, de lois.

1. Ensemble de lois régissant l’univers. L’ordre naturel est la loi d’une chose conforme à sa nature (Cousin, Philos. écoss.,1857, p. 223).L’artiste qui prétend maintenir les lois de la beauté et manifester une pensée négatrice de toutes lois, trouble l’ordre profond des choses. Dans le réel tout se tient ; qui proscrit l’ordre et la vérité dans la pensée doit les proscrire dans le style (Massis, Jugements,1923, p. 275) :

7. ... étant enfant je croyais à l’ordre du monde, je veux dire par là que je me figurais que tout était comme il devait être, que des lois justes gouvernaient la société entière ; et peu à peu, je découvris avec un sentiment d’inquiétude qui dure encore, que le monde était en proie à une folie générale, que rien n’était solide, que tout était suspect, et que nous vivions dans un état voisin du chaos. Green, Journal,1942, p. 211.

2. Organisation sociale ; ensemble des lois et des institutions régissant une société (dans ses composantes politiques, économiques, juridiques, etc.).

Service d’ordre. Formation de police ou formation militaire destinée à maintenir l’ordre, à réprimer les troubles.

3. Conformité à un règlement, à une norme ; respect du règlement, de la discipline.

B. − Catégorie, classe de personnes établie par l’attribution d’un rang dans une hiérarchie ou la soumission à des règles.

♦ Agir sur ordre. Agir en exécutant un ordre reçu d’un supérieur et non de sa propre initiative. (Dict. xixeet xxes.).

ANARCHIE CNRTL

A.− POL. État de désordre dans lequel se trouve une collectivité ou un État, par suite de la carence ou de la faiblesse du pouvoir politique. Tomber dans l’anarchie, sortir de l’anarchie ; réprimer, dompter l’anarchie ; fauteur d’anarchie (Ac. 1835-1932) :

1. L’abus que nous faisons de cette liberté est si criminel et si outré, qu’il doit nécessairement nous conduire à un nouvel ordre de choses. Oui, je le dis en tremblant, tôt ou tard il amènera l’anarchie ou la tyrannie, la désorganisation ou l’invasion de la violence ; et ce trop fragile système de liberté, et ces belles espérances de paix, de repos et de prospérité, passeront comme un songe ; ce grand et mémorable exemple de raison, que nous donnâmes à l’Europe, lors de l’acceptation de la nouvelle constitution, en 1789, comme l’éclair, n’aura brillé qu’un instant : ... J. de Crèvecœur, Voyage dans la Haute-Pensylvanie, t. 2, 1801, p. 328.

3. La politique est la science de la liberté : le gouvernement de l’homme par l’homme, sous quelque nom qu’il se déguise, est oppression ; la plus haute perfection de la société se trouve dans l’union de l’ordre et de l’anarchie. P.-J. Proudhon, Qu’est-ce que la propriété ?1840, p. 346.

B.− P. ext. Désordre, confusion due à un défaut d’organisation, à l’absence de lois, de règles, de principes directeurs. L’anarchie des esprits (DG, Ac. t. 1 1932).

ANTONIN ARTAUD (Marseille 1896-Ivry-sur-Seine 1948)

Avoir le sens de l’unité profonde des choses, c’est avoir le sens de l’anarchie, et de l’effort à faire pour réduire les choses en les ramenant à l’unité.

Héliogabale ou l’Anarchiste couronné, Gallimard« L’anarchie, c’est l’ordre sans le pouvoir. » Proudhon - 1809-1865 - Les Confessions d’un révolutionnaire pour servir à l’histoire de la Révolution de Février

Etymologie : du grec an, préfixe privatif, et de arkhê, pouvoir, commandement.

L’anarchie est un système politique qui vise à l’émancipation de toute autorité ou tutelle gouvernementale. L’Etat est considéré comme n’étant pas nécessaire et aucun individu ne se trouve sous la domination d’un autre (absence de hiérarchie entre les hommes). Le système social anarchique est fondé sur la libre entente des différentes composantes de la société.

Très souvent utilisé de manière péjorative, le terme anarchie désigne alors l’état de ce qui est sans commandement, sans lois. Il est synonyme de désordres, de confusion et de troubles qui n’ont rien à voir avec l’anarchie - système politique -, mais qui sont souvent liés à l’existence de pouvoirs concurrents. En raison de ce double sens du mot anarchie, source de confusion, l’usage du mot libertaire, à la place d’anarchiste, s’est développé depuis la fin du XIXe siècle. Autre synonyme : Acratie.

Pour les anarchistes, l’anarchie n’est pas synonyme de chaos, mais correspond à une situation harmonieuse résultant de l’abolition de l’Etat et de toutes les formes de domination et l’exploitation de l’Homme. Elle est fondée sur l’égalité entre les individus, la libre association, la fédération ou l’autogestion, voire parfois le collectivisme. L’anarchie est donc structurée et organisée, sans qu’il y ait une quelconque primauté de l’organisation sur l’individu.

En tant que doctrine politique, l’anarchie n’a été mise en pratique que très partiellement et ponctuellement. Mais elle a été développée sur le plan théorique par Charles Fourier (1772-1837), Pierre Joseph Proudhon (1809-1865), Michaël Bakounine (1814-1876).

L’anarchisme est le mouvement social ou politique qui a pour objectif de mettre en place l’anarchie.

anomie cntrl

Absence de normes ou d’organisation stable ; désarroi qui en résulte chez l’individu :2. ... si l’anomie est un mal, c’est avant tout parce que la société en souffre, ne pouvant se passer, pour vivre, de cohésion et de régularité. Une réglementation morale ou juridique exprime donc essentiellement des besoins sociaux que la société seule peut connaître ; ... Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. VI.

− P. ext. Contestation de la société, soit par refus de toute société, soit par désir de la réformer :

3. 1oTerme proposé par Durkheim au début du xxesiècle pour caractériser la conduite délinquante ou criminelle. Dans ce sens, on dit aujourd’hui dissocialité ou asocialité. Le terme implique le rejet de toute règle sociale ; 2odans un sens plus large, Merton a désigné par anomie tout refus de la loi telle qu’elle est, ce qui étend le mot à toute révolte contre la forme historique de la société, en vue de sa transformation positive. Mucch.Sc. soc.1969.

Anomique, adj.a) Non organisé : ,,Chapitre premier. La division du travail anomique : jusqu’ici, nous n’avons étudié la division du travail que comme un phénomène normal ; mais, comme tous les faits sociaux et, plus généralement, comme tous les faits biologiques, elle présente des formes pathologiques qu’il est nécessaire d’analyser.`` (Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. 343 ; 1reattest. du mot, dér. du rad. de anomie, suff. -ique*).b) Provoqué par l’anomie ; suicide anomique (Durkheim ds Lal. 1968) : ,,... quels sont les rapports possibles entre la conscience collective d’un côté et de l’autre les manifestations mécaniques, organiques, ou anomiques de la société ?`` (Traité de sociol.,t. 1, 1967, p. 65) ; attesté ds Lar. 20e, Lar. encyclop., Rob. Suppl. 1970.

contingnent

https://dicophilo.fr/definition/contingent/

(Sens strict) Qui n’est pas nécessaire.

(Traditionnellement) Ce qui peut être ou ne pas être, ou être autrement qu’il n’est.

Termes associés : Impossible Possible Nécessaire. Comprendre la notion de « contingence »

La définition traditionnelle

Selon la définition classique, est contingent ce dont l’existence n’est pas nécessaire. Quelque chose de contingent peut ne pas avoir lieu. Et s’il a lieu, cela ne change rien au fait qu’il aurait pu ne pas avoir lieu. Il est totalement contingent que vous lisiez cette phrase. Il est contingent que j’écrive cette ligne. Tout ça aurait très bien pu ne pas être.

Cela aurait aussi pu être autrement. Quelque chose de contingent qui existe pourrait exister autrement. La contingence ne porte pas que sur l’existence, mais aussi sur la façon d’être. Ce site utilise du rouge pour couleur de fond. Il pourrait utiliser du vert. Cela ne changerait rien. Peut être qu’à l’heure où vous lisez ces lignes, le site n’est plus rouge du tout. Et pourtant il reste le même site.

Un élément contingent peut disparaître ou être modifié sans toucher à l’essence de la chose. Un tabouret peut avoir trois ou quatre pieds, ça reste un tabouret. Un tabouret avec un dossier n’est plus un tabouret, c’est une chaise. Il est nécessaire pour un tabouret de ne pas avoir de dossier.

Une modalité logique. La contingence est une notion de logique modale. Elle s’intègre dans le quadruplet des modalités : elle se pense par rapport à la nécessité, la possibilité et l’impossibilité. Le contingent est l’opposé strict du nécessaire, mais l’on est souvent induit en erreur par la formulation classique vue plus haut. Selon la formule traditionnelle, le contingent peut être ou ne pas être.


1 contingent : Selon la définition classique, est contingent ce dont l’existence n’est pas nécessaire. Quelque chose de contingent peut ne pas avoir lieu. Et s’il a lieu, cela ne change rien au fait qu’il aurait pu ne pas avoir lieu.

2 Pierre Vial, Apollon et Dionysos.

3 Conférence retranscrite ordre et désordre. EDGAR MORIN, sociologue et philosophe des sciences français

4 Le Pourquoi du comment : philo Par Frédéric Worms. Comment le désordre est il pensable. 2023

5 Ordre et désordre le point de vue philosophique. Bernard PIETTRE, professeur de Philosophie.

6 intervention dans l’article de daphnée leportois « Arrêtons de voir le désordre comme un mal à éradiquer » 2019 slate.fr

7 Eugène Savitzkaia Marin mon cœur, Paris, Minuit, 1992, citation, p. 71.

8 Site internet, Philippe De Jonckheer

9 La chronique langue de Laélia Véron. La rhétorique de l’« ordre » et du « désordre ». 2023

10 Edgar Morin, sociologue et philosophe des sciences français Conférence retranscrite ordre et désordre.

11 Romain Rolland, écrivain français Citation,

12 citation du catalogue de l’exposition Freed from Designer. Au MABA 2022

13 Dyke est une appellation familière voulant dire ‘gouine’ en anglais. L’utilisation de se thermes historiquement péjorative est détourné par les lesbiennes afin de se le réapproprier positivement.

14 Interrogation d’Anja Kaiser dans le préambule de l’exposition au Signe, Centre national du graphisme de Chaumont. 2020

15 Graphiste, designer de l’affiche analysé : Rethink, Redesign, Recycle. 2019

16 Le Pourquoi du comment : philo Par Frédéric Worms. podcast : Comment contenons-nous le chaos? 2023

17 Émile Durkheim, De la division du travail social, livre 1893

18 Proudhon, Théoricien socialiste français, citation de son livre Qu’est-ce que la propriété? 1840

19 Hem Day, militant, citation, Violence - Non-violence - Anarchie, L’Unique, no 54-55-58, 1951